La statue de Sainte Anne

On eut un jour la malencontreuse idée de remplacer une vieille statue de Sainte Anne qui se trouvait dans la chapelle à la place d’honneur, par une statue neuve. La vieille image de la sainte fut mise dehors, dans une niche pratiquée à cet effet, au-dessus de la porte d’entrée. Durant près de trois mois, il ne tomba pas une goutte d’eau et les récoltes allaient être compromises. C’était à n’en pas douter une vengeance de la sainte. On en refera au curé, disant que le mécontentement était la cause d’une telle sécheresse. Après maintes hésitations, il accéda au désir des paroissiens ; on alla en grande pompe remettre à sa place la vieille statue. À peine y était-elle que le ciel se chargea brusquement de nuages et la pluie se mit à tomber en abondance. Ce fut un véritable déluge pendant le reste de la journée…

Si la sainte tient à occuper la première place dans la chapelle, à plus forte raison ne veut-elle pas que l’on transporte ailleurs son image. En des temps déjà lointains, la chapelle tombant en ruines, on vint en procession la prendre et on la porta dans l’église de Saint-Thurial. Le lendemain matin, on la retrouva à sa place. Elle y était revenue seule pendant la nuit, ajoutent les gens du pays, d’un air absolument convaincu…

Sainte Anne est particulièrement honorée à Goven, des vieillards surtout, qui lui attribuent un grand pouvoir. Il arrive fréquemment que de forts orages, s’accumulant au-dessus de la chapelle de l’Hermitage, soient, dit-on, dispersés miraculeusement par la Sainte qui récompense ainsi les paroissiens de leur fidélité…

Le vieil ermite

« On raconte qu’un vieil ermite habitait jadis près de l’endroit où s’élève actuellement la Chapelle de l’Hermitage. Par une année de grande sécheresse, il dut aller chercher son eau à plusieurs kilomètres de là. Le pauvre ermite était faible. Un jour qu’il rapportait à grand peine sa cruche pleine d’eau, il rencontra un enfant auquel il demanda de l’aider. Le garçon, d’un air aimable, lui dit : « Je n’ai pas le temps, mais je connais un moyen pour diminuer le poids de votre fardeau » Il prit la cruche et après s’être bien désaltéré, il en répandit à terre le contenu. Puis s’asseyant sur l’ouverture du vase, il dit avec un rire moqueur : « Voilà le moyen ! » À peine avait-il prononcé ces paroles insolentes, qu’une épaisse fumée se dégagea du sol et il sentit qu’il s’enfonçait dans la cruche.

Puis tout à coup, le sorcier le plus redouté de tout le pays, apparut au milieu de la fumée.  « Méchant gamin, dit-il avec indignation, pour te punir, tu resteras pris dans cette cruche tout le temps qu’il me plaira ; quand je jugerai la punition suffisante, je viendrai te dégager » Ayant dit ces mots, le sorcier disparut. L’enfant pleurait à chaudes larmes. La tête, les bras et les jambes seulement sortaient de la cruche. Ainsi pris, il ne réussit qu’après de longs efforts à faire basculer la cruche et reprit le chemin du retour, en marchant sur les mains et sur les pieds. Il était nuit lorsqu’il arriva au Bois de la Hayrie qu’il lui fallait traverser pour rejoindre le logis paternel. Il tremblait de frayeur en songeant aux loups et aux sangliers qui pullulaient alors dans ces parages. Le sorcier apparut à ce moment dans un second nuage de fumée. Jugeant la punition suffisante, il permit au méchant garçon de se dégager à condition de creuser, dès le lendemain matin, une fontaine près de l’habitation du vieil ermite. Dès l’aube, le coupable se mit au travail et creusa la fontaine avec le plus grand soin. On la voyait jadis à l’emplacement du lavoir actuel, situé près de la chapelle. D’après les anciens, qui l’ont vu dans leur jeunesse, elle fournissait une eau abondante et merveilleusement limpide. Elle ne tarissait jamais…

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